1.1.2 - Estimer l’ampleur du problème et ses causes probables

CONSEIL

Le suivi scientifique et la surveillance devraient, si les moyens financiers le permettent, ne pas correspondre exclusivement aux limites administratives mais s’appliquer à une entité écologique.

CONSEIL

Il est important d’être familiarisé avec le système ou les facteurs à étudier avant d’initier une quelconque étude. Cela comprend non seulement la connaissance de l’historique du site (historique de la gestion de la réserve par exemple), mais aussi, si c’est possible, la compréhension de la structure et des fonctions du système (LIKENS, 1987).

 

1.1.2.1 Identifier l’ampleur du problème

1.1.2.2 Identifier les causes

 

Cette étape consiste à définir la zone d’étude c’est-à-dire l’aire sur laquelle le problème se pose, et à définir les facteurs pouvant avoir une influence sur la problématique.

1.1.2.1 Identifier l’ampleur du problème

Identifier l’ampleur du problème consiste à préciser si la problématique est interne à l’espace naturel concerné (problématique locale), si elle concerne d’autres sites ou si elle s’intégre dans un contexte plus global, comme par exemple le suivi d’une population d’espèces à l’échelle nationale, ou le suivi de l’eau à l’échelle d’un bassin versant.

Il s’agit de l’échelle sur laquelle le phénomène est observé :

  • aire potentielle pour une espèce à inventorier,
  • espace géré si le suivi concerne l’évaluation de la gestion,
  • espace fréquenté si le suivi concerne la fréquentation humaine,
  • bassin hydrologique s’il s’agit de suivre les niveaux d’eau ou de réaliser l’inventaire du fonctionnement hydrique, etc.

Avoir une approche globale

Dans les réserves naturelles la problématique est souvent bornée aux limites administratives (parce que les moyens ne sont pas suffisants), notamment s’il s’agit du suivi d’espèces patrimoniales, bien qu’une connaissance plus large soit souvent utile à l’analyse et à l’interprétation des données. Le gestionnaire devra cependant avoir l’approche la plus globale possible de la problématique. Il tentera de ne pas se limiter à collecter des informations dans la seule réserve, mais aussi dans l’ensemble de l’écosystème, en recueillant notamment les données d’autres études, menées par exemple sur d’autres espaces naturels protégés et en s’intéressant aux utilisations de l’espace en dehors du site géré.

Cela peut être particulièrement intéressant lorsqu’il s’agit de mesurer les pressions extérieures (voir Figure n°3).
Cependant, étendre l’aire d’étude ne signifie pas forcément tout étudier.
Dans le cas de vastes réserves, en montagne par exemple, il est indispensable de limiter l’étude à quelques secteurs représentatifs.


Figure n°3 :
Exemple d’inventaire des accès automobiles
et itinéraires piétonniers de la Réserve Naturelle de Frankenthal, carte extraite du livre «A la découverte des Réserves Naturelles de France», (NATHAN, 2001).

 

Apprécier l’ampleur spatio-temporelle du problème

Figure n°4 :
Cartes montrant l’évolution des paysages végétaux de la réserve naturelle de Grand'Pierre et Vitain entre 1810 et 1980
Source : extrait du Plan de gestion (BEZANNIER F. 1999)

 

La recherche historique réalisée généralement dans le cadre du premier plan de gestion permet, s’il existe des cartes de répartition anciennes ou plusieurs campagnes de photographies aériennes, d’apprécier de manière plus fine l’ampleur spatio-temporelle du problème (évolution plus ou moins rapide et plus ou moins étendue d’un habitat dans l’espace).

Les photographies aériennes et l’exploitation qui en est faite permettent notamment d’apprécier la colonisation d’un espace ouvert par les ligneux (voir Figure n°4). Le gestionnaire peut aussi avoir une idée de l’aire de répartition concernée et de la vitesse d’évolution d’une espèce envahissante juste par la connaissance qu’il a du terrain, ou les photographies qu’il a pu prendre en période de floraison.

Penser à l’échelle d’exploitation des données

Le gestionnaire devra également préciser l’échelle d’exploitation des données :

Par exemple, la surveillance des populations de
Flamant rose en Camargue ne se limite pas à
l’étude des individus de la réserve naturelle
(limites administratives), mais à l’ensemble du
milieu camarguais.
  • stationnelle : au niveau d’une parcelle d’étude.
  • locale : au niveau de secteurs écologiques ou géomorphologiques.
  • par entités bio-géographique de vaste étendue (programmes interrégionaux) ; suivi de vautours, gypaètes et grands prédateurs dans la massif montagneux pyrénéen ; Réseau alpin des espaces protégés ;
    suivi du Grand Tétras dans les massifs montagneux…
  • par regroupement de sites ayant les mêmes problématiques (réseaux de sites et d’observateurs) : suivi des limicoles côtiers dans le cadre du réseau des réserves naturelles estuariennes, suivi de la végétation des îlots marins dans les réserves naturelles,…
  • nationale : réseaux nationaux de recueil de données. Programme STOC (Suivi Temporaire des Oiseaux Communs) du CRBPO par exemple ;
  • Plan de restauration nationaux ; réseau hydrologique piscicole national…
  • international : suivi des oiseaux d’eau (programme Wetlands International)…

1.1.2.2 Identifier les causes

Identifier la ou les causes d’un problème ne concerne que des opérations de suivi (entreprises pour comprendre et évaluer les changements observés sur le terrain). Dans la majorité des cas, pour les réserves naturelles, les causes ont été identifiées lors de la rédaction du plan de gestion (chapitre B3 : facteurs pouvant avoir une influence sur la gestion).

Les causes de changements écologiques observés sur le terrain sont parfois connues, voire évidentes. D’après PERENNOU et al. (1999), il peut s’agir de :

  • l’exploitation non durable des ressources : surpâturage, sur-chasse, surfréquentation touristique...
  • l’introduction d’espèces exogènes : plantes, poissons, tortue de Floride…
  • la gestion et la restauration : la colonisation des milieux ouverts par les ligneux est généralement liée à l’abandon des pratiques du pâturage (Photo n°3), etc.

Si les causes sont connues on cherchera à mieux définir les relations de cause à effet. Il est parfois difficile de les corréler avec des modifications observées sur des populations d’espèces animales, les causes de régression pouvant être diverses : fréquentation humaine en période hivernale ou estivale, modification du milieu et régression des zones à myrtilles pour le Grand Tétras. Dans la RN de la Baie de Somme une étude a été réalisée pour mettre en évidence les causes de dérangement des oiseaux manifesté par leur envol (voir Figure n°5).

Si elles ne sont pas connues, il faudra définir une méthode de suivi dont un des objectifs sera de les rechercher. Le gestionnaire tentera d’identifier si les causes sont internes ou externes au site.

Figure n°5 :
Les différentes causes d’envol des oiseaux dans la réserve naturelle au cours des mois de juillet et août.

Source : Extrait du rapport d’activité de la RN de la Baie de Somme.